8 avr. 2012

i' rit ou INRI pas ?!


Le seul triomphe du Seigneur, la Croix du Christ, a fait triompher déjà presque tous les hommes. Il importe donc de considérer en quel état Il monte . Je le vois dépouillé : c'est donc ainsi qu'il faut monter quand on s'apprête à vaincre le siècle, sans rechercher les secours du siècle. Adam fut vaincu, lui qui a cherché un vêtement (Gen., III, 7) ;  le vainqueur est Celui qui a quitté ses vêtements. Puis Il est monté tel que la nature nous avait formés sous l'action de Dieu : c'est ainsi que le premier homme avait habité dans le paradis, ainsi que le second homme est entré dans le paradis. Et afin d'être vainqueur non pour Lui seul, mais pour tous, Il a étendu les mains pour attirer tout à Lui (Jn, XII, 32), afin de dégager des liens de la mort, d'attacher au joug de la foi, d'unir au ciel ce qui était auparavant de la terre. On écrit aussi une inscription. D'ordinaire un cortège précède les vainqueurs ; mais le char triomphal du Seigneur fut précédé par le beau cortège des morts ressuscites. A l'ordinaire aussi un écriteau indique le nombre des nations subjuguées. A de tels triomphes de montrer, disposés dans un certain ordre, les captifs pitoyables des nations vaincues, honteux quand elles sont détruites : ici s'épanouit la beauté des peuples rachetés. L'attelage est digne d'un tel triomphe : le ciel, la terre, la mer, les enfers passent de la corruption à la grâce. Or l'inscription est tracée, et placée au-dessus de la Croix ; non pas au-dessous de la Croix, car « la principauté est sur ses épaules » (Is., IX, 6). Qu'est cette principauté, sinon son éternelle puissance et divinité ? Aussi, quand on l'interroge : « Qui êtes-vous ? » Il répond : « Le principe, qui vous parle » (Jn, VIII, 25). Lisons cette inscription : « Jésus de Nazareth, est-il dit, roi des Juifs.» Il est juste que l'inscription soit au-dessus de la Croix, parce que la royauté que possède le Christ ne tient pas à son corps humain, mais à sa puissance divine. Il est juste que l'inscription soit au-dessus de la Croix, parce que si le Seigneur Jésus était en Croix, Il resplendissait au-dessus de la Croix par sa majesté royale. Il était ver sur la Croix (Ps. 21, 7), scarabée sur la Croix : en bon ver il tenait à la Croix, en bon scarabée Il criait sur le bois (Hab., II, 11)72. Qu'a-t-Il crié ? « Seigneur, ne leur comptez pas ce péché » ; Il a crié au larron : « Aujourd'hui tu seras avec moi en paradis » ; Il a crié comme le scarabée : «Dieu, mon Dieu, regardez-moi ; pourquoi m'avez-vous délaissé ? » En vrai scarabée, Il remuait par les traces de ses vertus la boue de notre corps, jusque-là informe et pesante. En bon scarabée, Il relève le pauvre du fumier (Ps. 112, 7) : Il a relevé Paul, qui se considérait comme ordures (Phil., III, 8) ; Il a relevé Job, qui était assis sur le fumier (Job, II, 8).  L'inscription n'est donc pas quelconque. Quant à la place de la Croix, elle est au milieu, pour être vue de tous, ou, comme le prétendent les Hébreux, sur la tombe d'Adam : car il convenait d'attribuer aux prémices de notre vie la place qu'avait occupée le début de la mort.

(Traité sur 
l'Évangile de Saint Luc,
 par 
Saint Ambroise de Milan

, Tome 2.)


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